Main basse sur les retraites Agirc-Arrco
Pierre-Édouard du Cray : Agirc-Arrco : main basse sur nos retraites
Entretien - jeudi 28 janvier 2010
Directeur des études à Sauvegarde Retraites
http://www.sauvegarde-retraites.org/Dans une étude intitulée « Agirc-Arrco : main basse sur nos retraites », vous venez de lever un lièvre incroyable : l’État
s’apprête à « piquer » dans la caisse des retraités du privé pour alimenter celle du public. Pouvez-vous nous en dire plus ?
C’est un pillage en règle. L’opération doit consister à siphonner
plusieurs milliards d’euros dans les caisses complémentaires des
salariés du privé (Agirc-Arrco), pour alimenter le régime des
fonctionnaires contractuels et des élus (Ircantec). Alors que les
prestations servies par l’Ircantec sont près de deux fois meilleures
que celles des régimes de droit commun, Agirc et Arrco, à cotisation
égale. Pour reprendre l’expression, très juste, du journaliste de
l’hebdomadaire « Le Point » qui a repris l’étude de Sauvegarde
Retraites, « c’est Robin des bois à l’envers » : on vole aux pauvres
pour donner aux riches !
L’Ircantec est-elle en si mauvaise situation financière ?
Pour mettre en œuvre ce plan honteux, l’État prétexte du
changement de statut de La Poste qui devient une société anonyme (SA).
Les nouveaux embauchés de cette entreprise publique vont être affiliés,
non plus à l’Ircantec, mais à l’Agirc-Arrco. Or, les administrateurs de
l’Ircantec estiment avoir un droit de propriété sur les futurs
embauchés de La Poste pendant 50 ans – un demi-siècle ! Entendez bien :
< un droit de propriété sur des cotisants » dont, au surplus, beaucoup
ne sont pas encore nés !
Bien que l’Ircantec ait eu la chance, au cours des dix dernières
années, de recueillir 643 000 nouveaux cotisants, cette caisse est
incapable, aujourd’hui, d’assumer financièrement le niveau des
prestations qu’elle accorde à ses affiliés. Pour préserver coûte que
coûte ces avantages, la solution de facilité consiste alors à puiser, à
pleines mains, dans les autres caisses de retraite…
Et comment expliquez-vous que personne n’ait réagi ?
Cela paraît effectivement invraisemblable et c’est la question
que nous nous sommes posée. Pour autant, quand on regarde de plus près,
on s’aperçoit que tous les protagonistes de cette affaire y trouvent un
intérêt. L’État s’est engagé à « sécuriser » le régime de retraite
Ircantec auquel est affiliée une partie des fonctionnaires. Dans ce
contexte, la ponction opérée dans les caisses Agirc-Arrco lui apporte
un ballon d’oxygène. Les syndicats sont majoritairement dirigés par des
fonctionnaires. Leur priorité est donc de préserver les avantages des
agents publics, même au détriment des salariés du privé.
Par exemple, on serait en droit d’attendre que le syndicat des
cadres, la CFE-CGC, réagisse pour défendre les intérêts de l’Agirc,
c’est-à-dire la retraite complémentaire des cadres. Mais c’est sans
compter sur le fait que la CFE-CGC assure la présidence de l’Ircantec !
Enfin, le principe même de cette ponction a été voté et donc validé au
Sénat par le biais d’un amendement déposé lors des dernières
discussions sur la loi relative au changement de statut de La Poste. Ce
n’est pas un hasard : la Haute assemblée est élue au suffrage universel
indirect par les élus locaux. Élus qui sont tous, en tant que tels,
affiliés à l’Ircantec… Au bout du compte, tous se sont mis d’accord
pour nous tondre la laine sur le dos !
Que peut-on faire pour empêcher ce hold-up d’État ?
On ne peut pas rester les bras croisés. Maintenant, que
l’information a été dévoilée, il faut absolument la diffuser. À
Sauvegarde Retraites, nous avons lancé une campagne auprès de tous les
médias. L’hebdomadaire « Le Point » a déjà relayé l’information et ce
n’est qu’un début. Nous nous sommes également adressés directement au
Président de la République, au Premier ministre, au ministre de
l’Industrie, Christian Estrosi, qui a manigancé, en bonne partie, cette
opération.
Nous avons également interpelé tous les parlementaires, les 577
députés et les 331 sénateurs, les administrateurs des caisses de
retraite, pour qu’ils renoncent à cette funeste entreprise. Les 87 000
membres de Sauvegarde Retraites vont être mobilisés, nous allons lancer
une pétition nationale par courrier et par Internet. Enfin, il faut que
chacun, à son échelle, informe ses proches et ses connaissances de ce
scandale. Nous ne devons négliger aucun moyen d’action. Nous pouvons
réussir. Si un tel scandale éclate au grand jour, je doute que nos
politiques puissent l’assumer électoralement…
http://www.sauvegarde-retraites.org/A diffuser largement... Un vrai scandale